Le samedi 27 novembre se tenait à Lyon la manifestation contre les violences sexistes et sexuelles, organisée par le Collectif Droits des Femmes 69. Une très belle manifestation avec plus de 7000 personnes présentes! 

L'association Filactions ouvrait la manifestation avec le Happening des "Femmes en Blanc" place Bellecour pour dénoncer les féminicides, suivie de prises de paroles de collectifs, et d'une grande marche pour dénoncer les violences sexistes et sexuelles.

Les structures organisatrices ouvraient la marche derrière la banderole "En lutte contre les violences sexistes et sexuelles", suivies par un long cortège de milliers de personnes sous des slogans revendicatifs brandis ou collés sur leur passage. Les SuperFéministes étaient présent-e-s derrière la banderole "Féministes en colère" aux côtés d'autres collectifs militants locaux. 

Retrouvez ci-dessous le texte du Collectif Droits des femmes 69 qui a été lu avant le départ de la manifestation. Merci aux traductrices en LSF !

Retrouvez également quelques images et le passage dans le JT de France 3 :)

 

 "LES VIOLENCES SEXISTES ET SEXUELLES, CA SUFFIT !"

Nous sommes des millions de femmes à avoir subi et à subir encore des violences sexistes et sexuelles qui nous pourrissent la vie. 

Nous sommes des millions à avoir été victimes et avoir vu ces violences abîmer nos amies, nos sœurs, nos voisines, nos amoureuses, nos mères, nos enfants ou nos collègues.

Ces violences qui visent les femmes et les minorités de genre, ne sont pas un hasard. Elles sont issues du patriarcat qui est un système inégalitaire fondé sur un rapport de domination des hommes sur les femmes. Les violences sexistes et sexuelles s’inscrivent dans un continuum des violences c’est-à-dire, que toutes les violences exercées à l’encontre des femmes et des minorités de genre sont inséparables les unes des autres. Elles connaissent de nombreuses et diverses manifestations, allant du sexisme au quotidien aux violences conjugales, des violences psychologiques au harcèlement sexuel, du viol aux violences gynécologiques et obstétricales, des atteintes au droit à l’IVG aux stérilisations forcées…  Et elles s’exercent dans différentes sphères : dans la famille, dans le couple, au travail, et dans l’espace public.

Elles touchent aussi les enfants, co-victimes des violences conjugales ou victimes de violences sexuelles telles que l’inceste par exemple. Ces violences s’imbriquent et se cumulent pour certaines personnes en raison de leur situation de handicap, de vulnérabilité, de leur âge, de leur origine sociale, de leur statut de migrantes, parce qu’elles sont lesbiennes ou bisexuelles, parce qu’elles/ils sont transgenres, intersexes, parce qu’elles sont autistes ou parce qu’elles sont racisées, etc.

Le 25 novembre, journée internationale pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes, on se retrouve ensemble pour manifester et dénoncer ces violences issues de la domination masculine et de l'hétéro-patriarcat :

Les violences sexistes 

Dans notre société, les femmes sont encore trop souvent réduites à leur apparence physique et sont la cible de différentes conduites sexistes. Ce sexisme est fortement véhiculé par les médias et va se retrouver dans de nombreuses situations du quotidien et ce avant même la naissance jusqu’à la fin de vie quelle que soit la classe sociale.  Le sexisme prend ainsi de multiples formes, se conjugue aux autres rapports de domination et concerne tous les aspects de la vie, des plus intimes aux plus publics. C’est à la fois l’aboutissement d'un système de domination et l'un des maillons qui maintient ce système inégalitaire et hiérarchisé. 

 

 

Qu’il soit hostile ou soit disant bienveillant, le sexisme se produit dans un contexte de non-réciprocité qui entraîne une déshumanisation des femmes jugées incapables de faire des choix, peu ou pas autonomes, passives ou encore interchangeables. Il prend différentes formes plus ou moins visibles, plus ou moins définies comme des violences, telles que des remarques sexistes ; blagues ; commentaires paternalistes ; harcèlement dans l’espace public, au travail, cyberharcèlement ; « revenge porn » ; violences dans le couple ; contrôle de la sexualité, des tenues vestimentaires ou des sorties, etc.

Entre exotisation sexuelle, racisme ordinaire, classisme pour certaines, les femmes racisées vivent des violences liées à différents types de domination basés sur leur genre, race et/ou classe.

Ainsi, lors de leur prise en charge médicale, les femmes racisées sont souvent moins prises au sérieux que les femmes blanches par rapport à leur douleur et ont plus de risques de subir des violences médicales.

Certaines femmes subissent aussi une législation islamophobe. Face à une société raciste et sexiste, les parcours pour obtenir justice en cas de violences sont encore plus difficiles.

La vie de toutes les femmes est jalonnée par cette violence sexiste et ce n’est pas pour rien que nos voisines québécoises parlent de culture du viol ! Ces violences sexistes sont trop souvent minimisée et pourtant c’est bien d'un système oppressif dont il faut se défaire pour stopper l’infériorisation des femmes face aux hommes et l'infériorisation de toutes celles et ceux qui ne sont pas dans une norme binaire hétéro-patriarcale attendue. 

 

En ce qui concerne les violences conjugales

  • 102 féminicides conjugaux en 2020, déjà 104 en 2021

  • Chaque année en France plus de 200 000 femmes sont victimes de violences physiques et/ou sexuelles commises par leur conjoint ou ex-conjoint

Bien que la lutte contre les violences conjugales ait été déclarée grande cause du quinquennat et malgré le Grenelle contre les violences, force est de constater que les violences conjugales ne diminuent pas.  Les violences dans le couple concernent toujours près d’une femme sur 10 et une sur 3 au niveau international. Elles prennent différentes formes : violences psychologiques, violences verbales, violences administratives, violences économiques, violences physiques, violences sexuelles et féminicides. 

Les associations qui reçoivent les victimes voient leur activité exploser et le nombre d’appels pour violences sur les lignes dédiées a augmenté de plus de 40% pendant le confinement. 

Nous dénonçons le traitement médiatique des violences conjugales qui participe de leur banalisation. Trop souvent, les termes employés dans les journaux minimisent et rendent invisible la gravité des situations de violences subies par les femmes : "faits divers", "drames", "coups de folie" cachent en réalité les coups, viols et féminicides, jusqu'à, parfois, rendre les femmes elles-mêmes responsables des violences qu'elles subissent.

Les femmes sans-papiers victimes de violences conjugales sont exclues des dispositifs mis en place pour protéger les femmes. Si des lois ont bien été promulguées ces dernières années, les obstacles sont tels qu'elles sont difficilement applicables. Les femmes migrantes se retrouvent ainsi livrées à elles-mêmes.

Nous n'oublions pas les enfants qui doivent également être reconnu·es comme co-victimes des violences conjugales. On ne grandit pas correctement dans un contexte violent, et cela participe à la reproduction encore et encore des mêmes schémas de violence. 

 

En ce qui concerne les violences sexuelles, en France

  • Chaque année, 94 000 femmes sont victimes de viol ou de tentatives de viol.

  • Pour 91 % d’entre elles, les victimes connaissent leur agresseur.

  • Seules 12 % des victimes de viol ont porté plainte 

4 ans après le début du mouvement Me Too, la parole continue à se libérer sur les viols et les agressions sexuelles : au début de l’année 2021, la parution du livre de Camille Kouchner et la campagne #MeTooInceste ont montré l’ampleur du crime d’inceste, avec des dizaines de milliers de témoignages. C'est dans le cadre familial que les menaces sont les plus grandes pour les enfants : on estime que 3 enfants par classe sont victimes d’inceste ou de violences sexuelles par une personne proche.

Le milieu de l’enseignement supérieur voit peu à peu le silence se fissurer sur les violences sexuelles grâce au travail de l’association Clashes, le #SciencesPorcs ou encore des enquêtes journalistiques. Après le monde sportif, c’est dans le milieu du théâtre que sont dénoncées ces violences et l’impunité des agresseurs. Les comédiennes dénoncent et témoignent aujourd'hui massivement d'une culture du viol inhérente à l'apprentissage et à l'exercice de leur métier. Des rapports de séductions imposés par des metteurs en scène sous couvert de "travail artistique" vont jusqu'à des violences verbales, attouchements et agressions commis pendant les répétitions. Tout récemment, le #MeTooMedia a mis en lumière le caractère massif des violences sexuelles au sein des grands groupes médiatiques.

Des violences connues et étouffées depuis trop longtemps. 

Ces mouvements récents rappellent que le harcèlement sexuel et la culture du viol dans le monde du travail ne sont pas suffisamment combattus et sanctionnés par les employeurs.

Autre symbole du caractère institutionnalisé de ces violences et du rapport de domination masculine : les viols et agressions sexuelles sur les enfants perpétrées dans l’Eglise catholique. Le rapport Sauvé a comptabilisé au moins 330 000 victimes mineures depuis les années 1950 en France. La dimension systémique de ces violences a été mise en évidence : les agresseurs ont été, là encore, protégés par l’institution.  

 

 

Quelques jours après la commémoration des victimes de transphobie lors du TDOR, rappelons que les femmes trans connaissent, en plus des violences sexistes et sexuelles communes à toutes les femmes, des violences propres à leur identité : agressions transphobes, violences gynécologiques et médicales... Les femmes trans sont précarisées, et ainsi rendues plus vulnérables face aux violences, par la société qui refuse, jusqu'à dans nos milieux de lutte, leurs droits à disposer de leur corps, de leur identité et vivre dignement.

En ce 27 novembre 2021, nous adressons également nos pensées et notre solidarité aux proches et à la famille de Dinah, elle aussi victime des violences patriarcales car victime de lesbophobie et de racisme au sein de l'établissement où elle menait sa scolarité. Son suicide à l'âge de quatorze ans, dans la nuit du 4 au 5 octobre, nous rappelle cruellement les conséquences du harcèlement et des violences lesbophobes et racistes et le manque de politiques publiques à l'encontre de ces violences. En 2021, SOS Homophobie rappelait dans son rapport annuel que les lesbiennes font "face à une épidémie de haine." Polymorphes, ces violences vont des insultes aux menaces en passant par le rejet ou les agressions, dans les cadres scolaire, familial, professionnel, mais aussi dans le voisinage. Témoignage criant de cette haine, l'attaque d'un rassemblement pour la fierté lesbienne à Lyon, le 24 avril 2021, par un groupe de militants fascistes. Elle s'inscrit dans un contexte d'agressions multiples menées  par l'extrême droite à l'encontre de manifestations féministes ou LGBTI.

Nous dénonçons l’impunité dont ces groupes semblent bénéficier, alors que les militant.es antifascistes connaissent une répression massive. 

Partout en Europe mais aussi en France, la montée du fascisme est une forte menace sur les droits des femmes. 

 

Nous souhaitons faire entendre nos voix pour que les violences sexistes et sexuelles cessent. Nous voulons :

- Des moyens réels pour les associations qui accompagnent les femmes victimes de toutes violences, comme par exemple renforcer les moyens dédiés pour le 3919, la ligne d’écoute pour les femmes victimes de violences ouverte 24h sur 24 et 7 jours sur 7.

- Une hausse des hébergements d’urgence et la protection des victimes.

- La formation de tou.te.s les professionnel.le.s.

- Des campagnes de prévention et de sensibilisation dans les écoles faites par des structures qualifiées et féministes

- Une prise en charge correcte et féministe des auteurs de violences sexistes (qu'elles soient conjugales, sexuelles ...)

 

Nous sommes le 27 novembre. Et à ce jour, nous déplorons 104 féminicides conjugaux en 2021 ! Nous honorons nos mortes, mais nous devons aussi et surtout protéger les vivantes !

Quelle société, quelle démocratie peut accepter de voir autant de ses citoyennes violées, agressées, assassinées parce qu’elles sont des femmes ?

Quelle société, quelle démocratie peut accepter de voir autant de femmes chaque année subir des violences ?

 

Cela ne peut plus durer !

Nous devons nous regarder,

Nous découvrir des milliers,

C’est le temps de la colère, de notre colère.

Nous sommes toujours là

Pour faire entendre notre voix, notre colère et dire STOP

Crédit photos - © Estelle Bougain

Retrouvez en vidéo quelques images de la manifestation : extrait du JT France 3 Auvergne-Rhône-Alpes - 19/20 Rhône-Alpes du 27 novembre 2021.

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