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Idée reçue #1. Le « Gender » est une idéologie qui vise à rééduquer les enfants.

Les expressions « gender », « théorie » et « idéologie » sont utilisées à dessein pour décrédibiliser les études de genre et donner l’impression d’un complot. Il n’y a pas d’agenda caché derrière le genre : ce n’est pas un moyen d’endoctrinement, ni un plan d’action contre les familles, ni l’avènement d’une société asexuée.

Dire que les inégalités entre les femmes et les hommes sont socialement construites, c’est les rendre d’autant plus intolérables et injustifiables. Voilà la vraie raison pour laquelle le genre dérange. Après la bataille des droits, c’est celle des mentalités et des mœurs qui est en train de se jouer. Et sur ce terrain, qui touche aux représentations de chacun-e et à la sphère privée, l’opposition est encore plus forte.

Idée reçue #2. Apprendre l'égalité n'est pas du rôle de l'école : l'école instruit et les parents éduquent.

Il s’agit d’une vision bien réductrice de l’Ecole. Celle-ci ne peut pas se borner à « apprendre à lire et à compter ». C’est un lieu de vivre-ensemble et de formation civique qui n’est pas déconnecté du réel. De plus, l’égalité constitue une obligation légale et une mission fondamentale pour l'Education nationale.

Exemple : Un-e professeur-e qui voit deux élèves se battre dans la cour de récréation ne devrait pas intervenir au risque de dépasser les limites de ses fonctions ?

Selon le Code de l'éducation, article 121-1 : « Les écoles, les collèges, les lycées (...) contribuent à favoriser la mixité et l'égalité entre les hommes et les femmes, notamment en matière d'orientation. Ils assurent une formation à la connaissance et au respect des droits de la personne ainsi qu'à la compréhension des situations concrètes qui y portent atteinte ».

Idée reçue #3. Sous couvert d'égalité, la « théorie du genre » promeut l'indifférenciation sexuelle.

L’objectif des études de genre n’est pas de nier les différences sexuelles entre les femmes et les hommes. Celles-ci existent bel et bien. En revanche, elles ne doivent pas constituer ni justifier des inégalités.

Exemple : Le fait qu’un homme ne puisse pas porter d’enfant ni allaiter ne justifie pas qu’il s’investisse moins dans le soin et l’éducation de ses enfants qu’une femme. Cela ne revient pas à dire qu’hommes et femmes devraient être semblables ni identiques, mais qu’ils devraient être égaux.

Idée reçue #4.  Le « Gender » est contre-nature car il nie les spécificités de la nature féminine et la nature masculine.

Dire qu’il existe une spécificité féminine, c’est partir de l’idée qu’il y aurait d’un côté, un type de femme unique et de l’autre, un type d’homme unique. Or, il y a mille façons d’être « une femme » (ou « un homme »), selon les sociétés, les cultures et les époques.

Exemples : chez les Kashi en Inde, ce sont les femmes qui subviennent aux besoins de leur famille en allant travailler, tandis que les hommes restent au foyer. Dans cette culture, on attribue donc aux hommes des qualités qui seraient plutôt attribuées aux femmes dans notre société. On peut aussi citer les standards de la mode « féminine » et « masculine » qui ont changé au fil des époques : au temps de Louis XIV, par exemple, le roi et les courtisans portaient des bijoux, de la dentelle, des talons, du maquillage…

Idée reçue #5. Le « Gender » détruit la complémentarité anthropologique entre les hommes et les femmes.

De la même manière qu’il n’existe pas une nature féminine ou masculine unique, il n’existe pas une « complémentarité » naturelle entre les femmes et les hommes. Cette revendication d’une complémentarité est en fait largement utilisée pour légitimer et pérenniser la domination masculine. Car s’il y a complémentarité,  reste à définir qui fait quoi : les femmes au foyer et les hommes au travail ? Les femmes dans l’affect et les hommes dans l’action ? En définissant « la Femme » par rapport à « l’Homme », et jamais en tant qu’individu autonome, cette complémentarité vise  trop souvent  à garder les femmes sous la tutelle de leur mari.

Exemple : en Tunisie, c’est le parti conservateur qui avait demandé en 2012 l’instauration d’un article constitutionnel consacrant la « complémentarité » hommes-femmes au détriment de l’égalité des sexes. Il s’agissait en fait d’une remise en question du statut personnel des Tunisiennes.

Idée reçue #6. Le  « Gender » n'est qu'un prétexte pour faire la promotion de l'homosexualité.

Egalité filles-garçons et lutte contre l’homophobie sont intimement liées. De la même façon que les filles et les garçons qui s’éloignent des « modèles » féminins et masculins sont stigmatisés, les personnes qui s’éloignent de l’orientation sexuelle « attendue » de leur sexe font l’objet de discriminations et de violences. En 2014, les agressions physiques à caractère homophobe ont ainsi fortement augmenté. En milieu scolaire plus particulièrement, le nombre de témoignages pour actes homophobes continue de croître [Voir le Rapport sur l’homophobie, SOS Homophobie, 2014].

Parler de genre permet donc d’aborder tous les types de violences et de discriminations, qu’elles soient fondées sur le sexe ou l’orientation sexuelle. Cela ne signifie pas qu’on va parler d’homosexualité en tant que telle dès la maternelle, mais qu’on va apprendre aux élèves la tolérance et le respect, des valeurs qui ne sont pas nouvelles à l’Ecole.

Idée reçue #7. Le « Gender » nous dit « Je suis ce que je veux ». Homme, femme, homo, hétéro, je choisis comme si de rien n'était.

Le genre et l’orientation sexuelle sont deux aspects différents et indépendants de l’identité d’une personne. Le genre renvoie aux rôles, attitudes et comportements considérés comme « masculins » ou « féminins ». Un individu peut s’identifier ou non à ces représentations.

L’orientation sexuelle, quant à elle, renvoie à l’attirance physique, psychique et/ou affective d’un individu vers un autre, du même sexe ou non. L’homosexualité n’est pas un choix. Tout comme l’hétérosexualité, c’est une attirance qui s’impose à soi. Les études de genre n’affirment pas que chacun-e est libre de faire ce qu’il/elle veut, de changer à son gré de sexe ou de sexualité. Au contraire : elles parlent de normes qu’il est bien difficile de surmonter.

Idée reçue #8. Avec la « théorie du genre », on dénigre la femme, c'est antiféministe.

Au contraire, le genre permet de rendre visible la survalorisation de tout ce qui est considéré comme étant « masculin » dans notre société (actif vs. reproductif). Il ne s’agit pas de mettre en concurrence des prétendues « spécificité féminine » et « spécificité masculine » car c’est précisément cette hiérarchisation des représentations qui favorise aujourd’hui la domination du « masculin ». Il faut sortir de cette approche binaire et expliquer que ces représentations ne sont ni figées ni universelles et qu’elles sont sources d’inégalités en l’état actuel des choses.

Idée reçue #9. Les enfants ont besoin de stéréotypes pour se construire. Ce sont des repères. Il ne faut pas détruire ce que les parents ont construit.

Il ne s’agit pas de livrer les enfants à eux-mêmes ni d’entretenir une confusion entre les sexes. Prendre conscience des stéréotypes de genre, « décortiquer » le monde au-delà des apparences et des certitudes, c’est développer d’autres valeurs et repères fondamentaux pour des adultes en devenir : l’égalité, le libre choix, l’esprit critique, la tolérance

« Pourquoi insister sur le développement de la connaissance de soi et des autres » en tant que fille ou garçon », et qu’est-ce que cela signifie ? Imaginerait-on de faire de même avec les différences d’origine ou de couleur de peau ? Pourquoi dire aux élèves qu’ils se savent « reconnus » comme « garçon ou fille » car leur « différence »  s’entend grâce aux pronoms « il » et «elle » ? » [Source : Médiapart, Égalité des sexes à l’école : marche arrière, toute !, 16 janvier 2015.

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