La laïcité…. à corps perdu ?

À celles et ceux qui invoquent la laïcité ici et nationalement, et qui par là instrumentalisent le débat, nous rappelons, comme l’ont fait avant nous le Défenseur des droits (1) l’Observatoire de la Laïcité (2) et les fédérations iséroises des associations de La Ligue de l’Enseignement, La Libre Pensée, La Ligue des Droits de l’Homme (3) que la question des tenues de bains n’en relève pas. La loi de 1905 n’instaure pas de police du vêtement. La laïcité impose la neutralité au service public et à ses agent.e.s, pas à ses usager.e.s sur tout le territoire. C’est l’État qui se doit d’être laïque, pas la société. Et si L’Etat considérait que des lieux de baignade devenaient l’égal d’une école, ce serait donc à lui de légiférer préalablement sur le sujet.

 

À nos corps discriminés...L’égalité devant le service public

Ainsi que le relevait, en 2016 déjà, le Haut Commissaire aux Droits de l’Homme des Nations Unies les codes vestimentaires interdisant les burkinis sur les plages, « affectent de manière disproportionnée les femmes et les filles et sapent leur autonomie en niant leur aptitude à prendre des décisions indépendantes sur leur manière de se vêtir et constituent une discrimination claire à leur encontre » (4).

Ce qui est donc en jeu ici c’est bien une discrimination et une stigmatisation à l’encontre d’un groupe de personnes spécifique. La question du maillot de bain et la polémique médiatique montre bien la double oppression que subissent les femmes musulmanes du fait d’islamophobie et du contrôle patriarcal sur les corps. Sans relativiser la particularité de cette oppression, nous dénonçons l’injonction à la standardisation, des corps normés dans des maillots normaux, que nous subissons tous.tes, à différents degrés. Si certain.es sont tout à fait à l'aise en tenue de piscine, d'autres sont mal à l'aise en short de bain moulant, ou maillots standards. Qu'on soit trans, intersexes, non-binaire, ou cisgenre, le règlement intérieur de la plupart des piscines françaises nous impose arbitrairement la forme du maillot en vigueur. Finalement ce serait dans l’intérêt de toutes et tous de pouvoir porter son maillot de bain, selon ses choix, ses envies, son genre, son degré de pudeur.

 

Nos corps, nos débats

Depuis quelques semaines, chacun.e y va de son commentaire, de son étendard, et ne permet pas d’entendre ce que disent nos corps. Le Planning Familial, mouvement d'Éducation Populaire, qui par ses actions veut permettre à chacun.e de suivre son chemin, va proposer, avec d’autres associations, et surtout les citoyen.n.esconcerné.e.s, des espaces de dialogue sur l’ensemble du territoire, des espaces libres, sans injonction pour que si les règlements devaient évoluer cela soit possible sereinement. Nous le faisons au quotidien.


Nos corps, nos choix

Au Planning, nous militons pour le droit de chaque personne à disposer librement de son corps et nous nous inscrivons dans la lutte contre toutes formes de discriminations et d’inégalités sociales. Nous vivons dans un monde d’injonctions, majoritairement liées aux corps et particulièrement au corps des femmes. Nier qu’une femme est en capacité de décider pour elle-même, et lui interdire, à travers sa tenue certains espaces, certains sports et certaines pratiques ne sera jamais la clef de son émancipation.

Comme nous soutenons le combat de toutes les femmes qui luttent pour l’égalité d’accès au service public et ici aux piscines municipales, nous souhaitons qu’elles, leurs enfants et leurs familles puissent profiter des piscines, avec nous tous.tes. Cette question n’est pas une question territoriale mais bien nationale car si nous voulons l’égalité nous la voulons partout sans distinction.

Les règlements des piscines pourraient évoluer partout pour permettre à toutes les femmes et toutes les personnes qui le souhaitent de porter les tenues de bains dans lesquels iels se sentent à l’aise tant que celles-ci respectent les règlements d’hygiène et de sécurité. Or le maillot couvrant ne pose pas de problème d’hygiène ni de sécurité : aux piscines de Rennes, à Oslo (Norvège) il est autorisé depuis 2009 et en Suède on peut même en louer dans une piscine ! De plus, la tenue de plongée couvrante est portée fréquemment dans les bassins. L ’administration flamande a même fourni des preuves scientifiques qu’il n’y avait pas de problèmes dans ces domaines. Ainsi, « il faut que la tenue de bain soit dans une matière, par exemple le lycra, compatible avec la pratique de la nage. Le maillot ne doit pas être non plus porté avant d’entrer dans la piscine » Couvrant ou pas, on ne voit pas tellement de femmes en maillot de bain dans la ville.

 

À nos corps défendants…

En parallèle des actions piscines grenobloises, en juin 2019 à Annecy, une femme décide de se mettre topless à la piscine municipale et se fait sortir...ici, on ne brandira ni l'étendard de la laïcité, ni l’argument de la sécurité ou de l’hygiène, mais celui de “l’indécence”... alors en bikini, en maillot couvrant ou seins nus... Ne serait-ce pas simplement nos corps qui finalement dérangent ?

Nos corps, nos choix, tel est le principe fondateur de notre mouvement et une fois encore nous le réaffirmons, non à l’oppression, non à l’instrumentalisation et vive la liberté en maillot de bain couvrant, maillot de bain une pièce, bikini, short, jupette, topless, peu importe !

 

Féministement, sororellement, Le PF38

 

Contact presse : Céline Deslattes, présidente, 06 07 25 62 63

 

Sources :

 

(1) Décision du Défenseur des Droits - 27/12/2018

 

(2) Observatoire de la Laïcité 3/06/2019

 

(3) Ligue de l’Enseignement 

 

(4) Haut Commissaire aux Droits de l’Homme des Nations Unies

Prise de position de M. Rupert Colville, Haut Commissaire aux Droits de l’Homme des Nations Unies - 3/09/2016 

 

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