La Commission de la condition des femmes (CSW) est le principal organe de décision intergouvernementale de l’ONU, exclusivement dédié à la promotion de l’égalité de genre et de l’autonomisation des femmes. Sa session annuelle représente un événement capital pour le droits des femmes, rassemblant l’ensemble des Etats membres de l’ONU. Les Etats membres doivent alors rendre compte publiquement de leurs avancées sur le sujet. Pendant deux semaines, ils évaluent les progrès accomplis, identifient les points de blocage et élaborent de nouvelles normes et politiques mondiales pour y remédier.
Ces négociations aboutissent à une déclaration politique ou “conclusions agréées”, visant à mobiliser les gouvernements et d'autres parties prenantes, les Nations Unies elles-mêmes, les institutions nationales des droits humains, la société civile, le secteur privé, etc. Au sein de ce document final, les Etats membres s’entendent sur les engagements pour les droits des femmes qu’ils vont devoir respecter.
La soixante-neuvième session de la Commission de la condition des femmes s’est tenue du 10 au 21 mars 2025. Elle avait pour thème prioritaire le «Trentième anniversaire de la quatrième conférence mondiale sur les femmes et de l'adoption de la déclaration et de la plateforme d'action de Beijing (1995)». Le Planning familial était présent aux côtés de ses partenaires à cette occasion.
Organisation d’un évènement clé par le Planning familial: “Contrer les mouvements anti-choix : l’éducation complète à la sexualité, un outil émancipateur”
Le Planning familial a organisé un évènement intitulé “Contrer les mouvements anti-choix : l’éducation complète à la sexualité, un outil émancipateur”, dont l’objectif était de valoriser le travail effectué sur l’éducation complète à la sexualité et les enjeux de sa mise en place. Cet évènement a connu un vif succès en réunissant de nombreuses personnes sur place et en ligne. A travers des exemples français et belges, plusieurs échanges ont eu lieu afin de sensibiliser aux stratégies de l’extrême droite et des mouvements anti-choix contre la mise en œuvre de l’éducation complète à la sexualité. Des recommandations et des bonnes pratiques ont ainsi été partagées pour lutter contre ces stratégies conservatrices.
La montée en puissance des mouvements anti-choix et de l’extrême droite
Néanmoins, il faut noter que les mouvements et discours anti-choix sont de plus en plus présents à la CSW, cherchant à faire passer leurs messages conservateurs et rétrogrades. Ces mouvements organisés sont renforcés depuis le retour de l’administration Trump au pouvoir aux Etats-Unis. Ce dernier mène une politique offensive contre les droits des femmes, des personnes LGBTQIA+, des minorités de genre, les politiques de diversité, égalité et inclusion…
Par ailleurs, la montée en puissance des mouvances d’extrême droite partout dans le monde, et notamment en Europe, contribue à propager ces messages qui stigmatisent et réduisent les droits et libertés des populations. C’est dans ce contexte de menace des acquis en matière de défense des minorités, et d’aggravation du danger représenté par les mouvements anti-choix, que le Planning familial continue de lutter pour la reconnaissance de ces droits et contre les discours réactionnaires et anti-féministes. Cela s’observe tout particulièrement à travers l’organisation d’évènements parallèles anti-choix ou à travers l’obstruction lors des débats de la part des Etats-Unis ou de l’Argentine afin de ralentir l’avancée du travail autour de la déclaration politique.
Quelques mots sur l’adoption de la déclaration politique sur le trentième anniversaire déclaration et de la plateforme d'action de Beijing
Dans ce contexte, les négociations de la CSW ont été extrêmement difficiles mais ont tout de même débouché sur un texte plus progressiste que la précédente déclaration politique de 2020. Ainsi, le Planning félicite l’inclusion dans la déclaration politique de l’importance aux droits humains des femmes et des filles, tout en faisant référence aux formes multiples et intersectionnelles de discrimination.
Nous saluons, par ailleurs, la réaffirmation de la nécessité d’une budgétisation et d’une mise en œuvre de l’Agenda 2030 tenant compte des sexospécificités. Le texte comporte également un paragraphe fort sur le droit à la santé des femmes et des filles tout au long de leur vie, y compris une référence à la couverture sanitaire universelle. Il inclut l'engagement de veiller à ce que les victimes et les survivants de la violence sexuelle et sexiste et de la violence sexuelle dans les conflits aient un accès rapide et universel à des services sociaux et de santé de qualité et à la justice, ainsi que l'engagement de faire face aux risques et aux défis découlant de l'utilisation des technologies, dans le plein respect des droits humains de toutes les femmes et de toutes les filles, en ligne et hors ligne, et l'intégration de la dimension de genre dans les décisions politiques et les cadres qui guident le développement des technologies numériques, y compris l'intelligence artificielle.
Enfin, le Planning familial approuve la forte reconnaissance du rôle des femmes et des filles dans la résolution des conflits armés, la consolidation de la paix et la reconstruction post-conflit.
Des engagements concernant l’égalité de genre ont été réaffirmés, tandis qu’un programme de travail pluriannuel a été décidé pour les 4 prochaines années de la CSW.
Cependant, il faut tout de même noter que la déclaration politique ne fait aucune mention des droits et santé sexuels et reproductifs, tout comme l’éducation à la sexualité et la vie affective ou les droits humains des personnes LBGTQIA+ qui n’apparaissent pas dans le texte. Cela est extrêmement inquiétant et a largement été empêché par les Etats-Unis et l’Argentine qui ont ralenti toutes les négociations et promeuvent une vision conservatrice et traditionnelle de la famille. De plus, aucune mention à la protection des défenseur.euses des droits humains et activistes n’est faite.
Le Planning familial sera attentif à ce que le gouvernement français porte une attention particulière aux questions autours des droits et santé sexuels et reproductifs, d’autant plus que la France accueillera le Sommet de la diplomatie féministe en automne prochain et que la réalisation des objectifs de développement durable 2030 se rapprochent à grands pas.
Enfin, la France présidera le sommet du G7 en 2026, regroupant sept grandes puissances mondiales ainsi que des instances européennes et onusiennes, durant lequel nous appelons à continuer les efforts entrepris en matière d’égalité de genre. Le Planning familial encourage la France à maintenir une voix européenne progressive en faveur des droits et la santé sexuelle et reproductives dans les instances multilatérales, soutenir les activistes féministes, et poursuivre la mise en oeuvre ambitieuse de la stratégie “diplomatie féministe française”.
EN SAVOIR PLUS SUR LA CONFERENCE MONDIALE SUR LES FEMMES DE BEIJING
Cette année, la CSW a été marquée par le trentième anniversaire de la “Conférence mondiale sur les femmes de Beijing”, un tournant inédit pour le programme mondial de l’égalité des sexes. En effet, la Déclaration et le Programme d’action de Beijing, adoptés à l’unanimité par 189 pays en 1995, contiennent les principaux documents de politique mondiale en matière d’égalité des sexes. Ainsi, ont été déterminés des objectifs communs pour atteindre et promouvoir l’égalité de genre via l’autonomisation des femmes, aussi bien au niveau national qu’international.
Ce plan d’action établit 12 domaines de préoccupation prioritaires :
- les femmes et la pauvreté
- l’éducation et la formation des femmes
- les femmes et la santé
- la violence à l’égard des femmes
- les femmes et les conflits armés
- les femmes et l’économie
- les mécanismes institutionnels oeuvrant à la promotion de la femme
- les droits fondamentaux de la femme
- les femmes et les médias
- les femmes et l’environnement
- les jeunes filles.
Depuis cette conférence, de nombreuses mesures et actions ont été entreprises par les différents gouvernements des Etats signataires, par la promulgation ou la révision de leurs législations, pour améliorer l’accès des femmes à la justice nationale et internationale.
BIBLIOGRAPHIE
Sur la CSW
Retour sur la CSW 68
Présentation de la CSW 69 - ONU (en anglais)
Conférence de Beijing
Retour sur la création de la conférence de Beijing
Programme d'action de la conférence de Beijing
Déclaration politique
IPPF - The Commission on the Status of Women Adopts by Consensus the Political Declaration
CONTACT
Noémie GARDAIS, chargée de plaidoyer international
noemie.gardais@planning-familial.com