L’ensemble des associations et collectifs signataires de ce texte appelle tou·tes celles et ceux qui veulent en finir avec les violences sexistes et sexuelles à manifester le samedi 26 novembre à 14h30, Place Graslin.

En 2022, les violences sexistes et sexuelles restent massives. Elles abîment et parfois brisent la vie de millions de femmes, de personnes LGBTQIA+, d’enfants, de familles. Face à cette réalité, la prise de conscience collective n’est pas suffisante.

Les violences sexistes et sexuelles surviennent partout, et tout le temps. Elles trouvent racine dans le patriarcat, le capitalisme, et se situent également au croisement d’autres discriminations racistes, classistes, validistes, psychophobes, LGBTQIA+phobes, sérophobes, grossophobes, âgistes, islamophobes, antisémites, xénophobes, etc.

Ces réalités sont insupportables, et pourtant nous les supportons tous les jours. Cela suffit !

Quand 225 000 femmes sont victimes de la violence de leur conjoint ou ex-conjoint chaque année, quand 10 personnes par jour sont victimes de viols ou tentatives de viol, quand 1/3 des femmes sont victimes de harcèlement sexuel au travail, quand 80 % des femmes handicapées sont victimes de violences, quand 85 % des personnes trans ont déjà subi un acte transphobe, quand 69 % des femmes racisées sont victimes de propos discriminants au travail, quand 75% des agressions islamophobes visent des femmes, dont 100% des agressions physiques les plus graves, quand on sait que la plateforme de lutte contre les violences faites aux TDS recense en moyenne 30 agressions de TDS en un mois, quand les femmes grosses ont 4 fois plus de risque d’être discriminées au travail, quand 6,7 millions de français·es ont subi l’inceste, quand pour 1 femme sur 6, l’entrée dans la sexualité se fait par un rapport non consenti et désiré, quand des patient·es sont violé·es dans des cabinets gynécologiques ou des maternités, nous n’avons pas le choix !

Toutes ces violences découlent du même système capitaliste, patriarcal, raciste et validiste. Combien de temps encore allons-nous nous laisser faire ? Face à ce constat, nous appelons à manifester contre les violences sexistes et sexuelles, contre ce système, et nous exigeons des mesures pour y mettre fin !

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Dans un contexte déjà marqué par des attaques contre les secteurs les plus essentiels de la société (Loi sur l'assurance chômage, casse des services publics de la santé et de l'éducation, réforme des retraites...), le gouvernement Borne a "préparé" cet été la population à "faire des sacrifices" et à assumer l'inflation. C'est notamment sur les terrains de l'alimentaire et de l'énergie que cette inflation se ressent, fragilisant davantage les plus précaires. Le système patriarcal et néo-libéral se fonde sur des rapports d'oppression qui exploitent les femmes et minorités de genre, notamment via le travail gratuit qu'iels fournissent. Celleux-ci sont les plus vulnérables, subissant les inégalités salariales, les discriminations à l'embauche, les temps partiels subis ou encore le harcèlement sexuel au travail.

À cela s'ajoute la réforme des retraites, que le gouvernement entend passer en force, alors qu’elle avait mis dans la rue des milliers de travailleur·ses en 2019/2020.

Les mobilisations récentes sur les salaires ont vu se mobiliser encore une fois les secteurs du travail social, de l’hôpital ainsi que des cliniques, dont les conditions de travail et de vie sont toujours plus insupportables.

Ce contexte économique exacerbe et rend plus visible encore l’ampleur des violences sexistes, qu’elles soient verbales, physiques, sexuelles, économiques ou sociales. Au travail, dans la rue ou dans la sphère privée, ces violences sont quotidiennes et systémiques.

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Nous, femmes et minorités de genre, travaillons dans les secteurs les plus féminisés - médical, social ou encore éducatif - essentiels au bon fonctionnement de notre société, et qui sont paradoxalement aussi les plus dévalorisés socialement et financièrement. Nous exigeons qu’ils soient mieux rémunérés, à la hauteur de leur utilité, leur pénibilité et leurs qualifications. Par ailleurs, nous exigeons l’abandon de toutes les mesures qui contribueront à nous précariser davantage, dont celle de la réforme des retraites.

Dans la sphère privée, nous assumons gratuitement la majeure partie du travail domestique, d’éducation et de soin. Nous exigeons la reconnaissance de ce travail ainsi que des services publics gratuits et de qualité prenant en charge la petite enfance et la vieillesse, l’éducation, la dépendance, la restauration et le nettoyage.

Nous refusons aussi le cadre juridique discriminatoire qui précarise les travailleur·ses du sexe et prostitué·e·s. Précarisé·es, nous sommes la cible de davantage de violences. Nous demandons la reconnaissance de nos droits et exigeons le retrait de la loi de pénalisation des clients.

Nous exigeons la liberté de disposer de nos corps. Les Etats-Unien·nes ont dénoncé les attaques contre le droit à l'IVG au début de l'été - attaques ayant touché davantage les femmes racisées et précaires, ainsi que les hommes trans. Nous soutenons le droit à l'IVG pour toustes, partout dans le monde. Nous exigeons de véritables moyens matériels et humains pour tous les centres IVG, la réouverture des 130 centres fermés en 15 ans, la suppression de la double clause de conscience qui participe à une moralisation indue de l’avortement, et la possibilité pour les sage-femmes de pratiquer l’aspiration jusqu’à 16 semaines d’aménorrhée. Contre les idées conservatrices qui gangrènent chaque jour un peu plus notre société, nous demandons la constitutionnalisation de l’IVG pour toustes, quand bien même nous savons qu'elle ne garantira rien sans les moyens qui rendraient ce droit effectif. Précisons aussi que le projet de constitutionnalisation de l'IVG, déposé par Aurore Bergé, exclut sciemment les hommes trans, ce que nous dénonçons.

Les récentes attaques contre le Planning Familial à l'occasion de sa dernière campagne doivent nous conduire à lutter toujours plus contre les violences et discriminations en raison de nos identités de genre et de nos orientations sexuelles. Nous revendiquons l’autodétermination et la liberté de disposer de nos corps. Nous demandons le respect de la loi et un accès aux soins non discriminé, sans que notre identité soit débattue.

De même, nous dénonçons les mutilations génitales et traitements inutiles pratiqué-e-s sans consentement et dès l'enfance sur les personnes intersexes.

Nous réfutons le mythe selon lequel les femmes trans seraient des hommes dissimulés et agresseurs, et revendiquons la gratuité et l'accessibilité des parcours de transition et de PMA pour toustes, la gratuité et l’accessibilité de tous les moyens de contraception, des parcours de transition entièrement remboursés et des démarches administratives transparentes et rapides.

Nous nous positionnons en solidarité avec toutes les populations qui luttent pour leurs droits et contre les violences. Les Iranien·nes dénoncent aujourd'hui à la fois les injonctions qui contraignent toujours plus les corps des femmes, et la crise économique qui met la majeure partie de la population dans des difficultés extrêmes. Cette crise s'explique autant par les orientations politiques du gouvernement iranien actuel que par les sanctions économiques contre l'Iran mises en oeuvre par les gouvernements des pays impérialistes. Nous dénonçons pour cette raison l'hypocrisie de la récupération par le gouvernement français de la "cause des femmes iraniennes", comme nous dénonçons les récupérations conservatrices de leur lutte à des fins islamophobes et racistes. Les Iranien.nes se battent contre l'obligation de porter un voile, donc pour la liberté de choisir. De la même façon, les femmes musulmanes revendiquent leur liberté en France.

Nous luttons pour la libre circulation de toustes et des conditions d'accueil dignes pour les exilé.es. Nous dénonçons les violences sexuelles subies par les femmes et personnes LGBTQIA+ durant les parcours migratoires, ainsi que la violence d'État à laquelle ces personnes sont confrontées à leur arrivée en France.

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Femmes, minorités de genre, enfants, font face au harcèlement, aux violences physiques et sexuelles, aux viols et aux féminicides dans l’indifférence générale, y compris celle des institutions qui prétendent assurer leur sécurité (violences policières, médicales, judiciaires et sociales).

Nous rappelons que 91% des victimes connaissaient leur agresseur. Focaliser la politique publique contre les violences de rue, comme cela a été fait lors des tragiques évènements qui ont eu lieu à Nantes ces dernières semaines, fait monter l'impression d'insécurité si chère à l'extrême droite. Promouvoir ainsi la répression comme méthode de lutte et ne donner comme solution que plus de surveillance, plus de caméras et plus de flics dans nos rues est la porte ouverte à plus de discriminations envers les hommes racisés et de classe populaire. La création d'un Centre de Rétention Administrative pointe également les exilés comme auteurs de violences. Non seulement ces mesures sont racistes mais elles sont grave dans leur inutilité. C'est un tour de passe-passe qui dédouane les vrais auteurs de violences.

Alors que les discours publics incitent les victimes à parler et dénoncer les violences sexuelles subies, des personnages politiques de premier rang défendent haut et fort les agresseurs, y compris lorsqu’ils ont été condamnés, envoyant un signal d’impunité à toute la société. Des hommes puissants, accusés de viol, instrumentalisent la justice pour attaquer leurs victimes à travers des procès-bâillon dont le but est de faire peur et de réduire les victimes au silence.

Lorsque ces dernières portent plainte ou saisissent la justice, les institutions rejettent massivement leur parole : absence d’enquêtes, blâme des victimes, discrédit de la parole des enfants, déqualification des viols, classements sans suite, peines dérisoires. Aux violences dénoncées s’ajoute la violence institutionnelle.

Lorsque nous, mouvements féministes, portons dans le débat public des violences que les institutions refusent de traiter, le Président de la République parle de tribunal médiatique et d’inquisition, et appelle à « laisser la justice faire son travail ».

Son travail ? Les chiffres sont sans appel : 80 % des plaintes pour violences au sein du couple sont classées sans suite ; 65 % des victimes de féminicides avaient saisi les forces de l’ordre ou la justice ; 2 victimes sur 3 font état d’une mauvaise prise en charge lorsqu’elles veulent porter plainte ; 90 % des plaintes pour harcèlement sexuel au travail sont classées sans suite ; seulement 0,6 % des viols sont condamnés ; 92 % des enfants qui parlent des violences sexuelles ne sont pas protégé·es.

Nous manifesterons pour crier que NON, la justice et la police françaises ne font pas leur travail.

Il est temps que l’ensemble de la société et les pouvoirs publics regardent en face cette situation, qui ne relève pas de dysfonctionnements ponctuels, mais d’un système qui reproduit les mécanismes de violences et de domination qu’il est censé combattre.

Nous exigeons le respect de la parole des victimes et de réelles mesures contre les violences sexistes et sexuelles, en termes de prévention et d’éducation, de soins, de protection et d’accès aux droits.

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Nous ne sommes pas que des victimes. En luttant ensemble nous pouvons reprendre le pouvoir sur nos corps et sur nos vies. Nous devons faire entendre nos voix et les voix de celles et ceux qui ne sont plus là.

Le temps du recueillement est fini : nous voulons être vivant·es et libres !

Signataires

CLAC-ENSAN, Féministes Révolutionnaires Nantes, Nosig, Nous Toutes 44, Paloma, Planning Familial 44, Pour une MEUF44, Reboo-T et QRAM

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